📢 Nous devons tous comprendre
les enjeux du numérique
car nous sommes tous concernés individuellement et comme citoyen,
même si nous ne sommes pas à l'aise avec Internet.
28/11/2024
Cet article rappelle d'une part le contexte de fracture numérique en France et de l’importance de l’illectronisme, et donc de l’invisibilisation des plus démunis, d'autre part la transformation numérique rapide en cours de l’État et la problématique des moyens mis en œuvre pour la lutte contre l’illectronisme. Il pose la question de la citoyenneté menacée par ce contexte, telle que soulignée par le collectif Citoyenneté & Numérique.
L’illectronisme, parfois appelé « illettrisme numérique », caractérise la situation d’un adulte ne maîtrisant pas suffisamment les usages des outils numériques usuels pour accéder aux informations, les traiter et agir en autonomie dans la vie courante. Souvent associé à un problème de niveau d’équipement et d’accès à Internet, la notion d’illectronisme se rapporte plus spécifiquement à la non-maîtrise des compétences numériques (connaissance de l’environnement numérique, savoir-faire dans l’utilisation du matériel, des logiciels et des interfaces, ressources pour adapter et transférer ses connaissances et savoir-faire, etc.). "Une caractéristique centrale du numérique : aucun apprentissage n’y est définitif. Les mises à jour, les nouveautés technologiques, les nouvelles applications sont souvent déstabilisantes. C’est une remise en cause permanente de ses savoir-faire qui est nécessaire, et qui mobilise une plasticité et une souplesse constantes." Jean-Marie BESSE Livre blanc contre l'illectronisme, SPS, 2019.
Dans un contexte de croissance des usages du numérique et de la fracture numérique que nous évoquons rapidement ci-dessous, quatre associations (ATD Quart Monde, Emmaüs Connect, Emmaüs France et la Fédération des Acteurs de la Solidarité), associées au médialab de Sciences Po, ont créer le collectif Citoyenneté & Numérique pour agir en faveur d’une citoyenneté inclusive à l’heure du numérique. Cet article a pour objectif de faire connaître cette démarche.
Le site de l'INSEE donne de nombreuses informations sur cette croissance rapide du numérique.
Utilisation d’Internet dans le monde,
chiffres cités pat https://www.blogdumoderateur.com/
• deux habitants sur trois (66,2 % précisément) utilisent Internet. : 5,35 milliards de personnes utilisent Internet, 68,8 % des hommes sont connectés à Internet, contre 63,5 % des femmes, L’utilisateur moyen passe 6h40 par jour sur Internet, Internet est plus utilisé en ville (78,8 %) qu’en milieu rural (48,9 %),
• 96,5 % des utilisateurs d’Internet se connectent via leur smartphone, 61,8 % des utilisateurs d’Internet se connectent depuis un ordinateur (fixe ou portable),
• La prédominance de Google et 52 % des sites web sont en langue anglaise : Google est le moteur de recherche le plus utilisé au monde, captant 91,6 % de part de marché, Google Chrome est le navigateur le plus plébiscité, avec 64,7 % de part de marché.
le baromètre numérique (enquête) réalisée par le Crédoc pour l’Arcep, le CGE, l’ARCOM et l’ANCTvous donnera des chiffres réactualisés.
Pour de nombreux citoyens, en particulier les plus précaires, le numérique ne tient pas toutes ses promesses. C’est même un facteur d’exclusion supplémentaire.
19% des moins de 25 ans sont ainsi éloignés du numérique, le plus souvent parce qu’ils sont issus de familles modestes et n’avaient pas d’ordinateur à la maison (rapport ANCT 2022).
61% seulement des personnes non-diplômées sont équipées en ordinateur en France, contre 98% des personnes diplômées (Insee, 2021).
Cet "illectronisme" approfondit la fracture sociale et générationnelle et devient un handicap majeur dans une société toujours plus numérisée et face à une dématérialisation croissante des services publics.
Dans un rapport de juillet 2024 sur le pilotage de la transformation numérique de l’État par la DINUM ( la direction interministérielle du numérique), la Cour des comptes estime que la stratégie numérique de l’État a manqué de stabilité depuis 2011 et d'une adhésion interministérielle suffisante.
Pour avoir une vision détaillée de ce chantier et « qui fait quoi dans l’administration » sur ce sujet « numérique », voir le site https://www.vie-publique.fr/eclairage/18925-e-administration-la-transformation-numerique-de-letat
Citons les (nombreuses) structures de l’État (situation qui risque d’évoluer à chaque changement de gouvernement) :
• la direction interministérielle du numérique (DINUM), service du Premier ministre chargée d’élaborer et de piloter la stratégie numérique de l’État. La Cour des comptes dans son rapport de juillet 2024 formule plusieurs recommandations, notamment renforcer l'assise interministérielle de la DINUM
• Un comité interministériel de la transformation publique (CITP) chargé de définir la politique gouvernementale en la matière et de s'assurer de son application
• un délégué interministériel à la transformation publique qui coordonne l'action des ministères. Le programme Action publique 2022 est piloté par
• la direction interministérielle de la transformation publique (DITP), rattachée au ministère de la transformation et de la fonction publiques, qui pilote le programme "Action publique 2022".
Remarque : A noter que un des outils, le "Pass Numérique" (les chèques Aptic), mis en place par l’État s'est arrêté brusquement. Le 16 janvier 2024, la société coopérative d’intérêt collectif (SCIC) #APTIC a été placée en liquidation judiciaire. Ce dispositif #APTIC a occupé ces dernières années une place importante dans les politiques publiques et nationales de soutien à la montée en compétences des citoyen.nes . Soulignons le déploiement compliqué de ces Pass, du montage des marchés publics d'acquisition des pass par les collectivités à leur utilisation effective par les bénéficiaires, en passant par leur distribution par les structures de proximité, les centres sociaux, agences Pôle Emploi et autres CAF. Certaines structures de proximité ont été fragilisée par cet faillite de ce dispositif. Au bout du compte, un quart seulement des 2 millions de pass qui devaient être déployés auraient été utilisés, avec seulement 40 000 personnes formées en avril 2023, contre les 400 000 initialement prévues (voir https://acteurspublics.fr/articles/pass-numeriques-autopsie-dun-echec).
L’état a donc lancé une numérisation des démarches administratives qui impactent en particulier la vie des éloignés du numérique. D’après ce rapport de la cour des comptes de 2024, au moins 250 démarches (liste dite du « top 250 ») sont opérationnelles, dont les résultats sont régulièrement communiqués dans le cadre de « l’Observatoire de la qualité des démarches en ligne ». Au total, ces démarches représentent une volumétrie de près d’un million d’actes. Publiée en janvier 2024, la dernière version de l’Observatoire fait état d’un taux de recours à la voie dématérialisée de 83,8 % en moyenne. Pour ces démarches, l’état affiche une volonté de mettre en place deux principes : « l’administration proactive » et « Dites-le nous une fois ». Le rapport de la cour des comptes montre que l’ambition affichée officiellement est loin d’être suivie de résultats probants.
🔥 Dans l’avis la Commission supérieure du numérique et des postes (CSNP) du 28-novembre-2024-« Pour une politique nationale d’inclusion numérique adaptée aux besoins de nos concitoyens », la CSNP souligne que « au printemps 2024, le Baromètre du numérique du Crédoc indique que 25% des Français ne maîtrisent pas suffisamment les outils numériques pour les utiliser pleinement. Force est de constater que cette proportion de nos concitoyens qui ne maîtrisent peu ou pas les outils du numérique ne diminue pas sensiblement… Les membres de la CSNP, comme ils l’avaient déjà recommandé dans leur avis n°2022-08 du 14 décembre 20224, considèrent que le maintien d’une présence physique des services publics sur l’ensemble des territoires est essentiel ».
🔥 En juillet 2024, La Cour formule plusieurs recommandations à l’État, notamment clarifier ses moyens budgétaires.
👉 La transformation numérique de l’État imposera de nouvelles interfaces internet aux usagers citoyens, et donc en particulier aux personnes éloignées du numérique ou peu à l'aise. Pour un éclairage sur la lutte contre l'illectronisme par l’État, vous trouverez des éléments dans l'article : E-administration : quelle politique pour les exclus du numérique ?:
Citons l’article des Echos de Leila de Comarmond publié le 20 févr. 2024 « L'opinion des Français sur leurs services publics s'est dégradée pour la deuxième année consécutive en 2023, montre la dernière édition du baromètre de l’institu Paul Delouvier, qui mesure la satisfaction des usagers …Seules 44 % … ont déclaré avoir une « bonne opinion » des services publics. La baisse est de 2 points en un an, après déjà 6 points l'année précédente. » « Les Français concentrent toujours leurs attentes à l’égard des services publics sur le suivi de leur dossier et le respect des délais (44%), la disponibilité des agents (43%) et l’orientation vers la personne compétente (38%). ».
La disparition physique des services publics de proximité s’est accompagnée d’une dématérialisation qui a entraîné une relation parfois quasi exclusive des citoyens-usagers avec l’administration sur des supports numériques, relation très pénalisante pour les éloignés du numérique.
👉 Pour aller plus loin sur ce thème, lire l’article du 13/12/2024 de Thierry Libaert de la Fondation Jean-Jaures
En attendant un éventuel débat national sur la qualité nécessaire de la « relation au service public » (au Conseil économique, social et environnemental (CESE) ?), il est nécessaire de soutenir et d’améliorer les actions en cours de l’État, et en particulier les « espaces France Services » et les « conseillers numériques »
Remarque : Rappelons que "France services" est un label de l'Etat pouvant être octroyé aux structures respectant l’ensemble des critères du cahier des charges. En 2023, les France services sont portées par :
• les collectivités territoriales (64 % des structures) ;
• les points de contact de La Poste (18 %) ;
• les associations (15 %) ;
• les préfectures ou sous-préfectures (1 %) ;
• les caisses de la MSA (la sécurité sociale agricole).
Ces 4 organismes
ont lancé une démarche pour créer le collectif Citoyenneté & Numérique. Voir https://citoyennete-et-numerique.org/le-collectif/
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« La citoyenneté est le socle sur lequel repose notre contrat social et notre capacité à faire société. Pourtant, à l’heure du tout-numérique, l’égal accès de chacun au plein exercice de sa citoyenneté se voit menacé, fracturé.
"Parce que cette urgence est encore sous-estimée ou ignorée, parce que le numérique tend à fabriquer des citoyens de « seconde zone », parce que nous constatons, chaque jour, l’invisibilisation des plus démunis, nous tirons la sonnette d’alarme. »
Espérons que cette démarche apporte des éléments concrets rapidement de réponse à la crise de notre démocratie, et à la représentativité des éloignés du numérique.
L' Habileté numérique est la capacité d’accéder à l’information, de la gérer, de la comprendre, de l’intégrer, de la communiquer et de l’évaluer, ainsi que de créer et de diffuser des informations, en toute sécurité et de manière appropriée à l’aide des technologies numériques.
👉 L’habileté numérique implique une dimension d’engagement actif et civique dans le monde numérique, et est une condition préalable au développement d’une citoyenneté numérique active et autonome.
Pour illustrer ce besoin d’ "habilité numérique", soulignons en autre le contexte de "guerre du numérique" sur les réseaux internet. Cette capacité « habilité numérique » permet de bien faire la distinction entre désinformation, mésinformation et information malveillante.
Remarque : Pour signaler un contenu illicite : connectez-vous sur
Internet-signalement.gouv.fr.ou https://www.pointdecontact.net/
Prenons aussi connaissance de l’ampleur de l'action des Bots (robots générateurs de messages) et badbots (robots malveillants) sur internet. La radio «France Info» le 25 novembre 24 a fait une courte émission de 5 minutes sur ce sujet. Ci-dessous un résumé des points qui ont attiré notre attention. "Dans le trafic internet mondial sur les réseaux, « 50% sont du trafic humain et les autres 50% sont du trafic automatisé, via des robots », détaille à la radio « France Info » le 25 novembre 24 Florian Malecki, l’un des responsables d'Imperva, société américaine de cybersécurité, une filiale du français Thaleselon Imperva, … « les bots vont, c’est mathématique, bientôt dépasser l’activité des humains"».
Et dans cette part du trafic généré » par des machines, « 32% du trafic bot sont du trafic de robots malveillants. Et cela va continuer à augmenter." « Des contenus massivement sont dupliqués, même s'ils sont reformulés par de grands modèles de langage...Tout cela est aidé, désormais, par l’intelligence artificielle pour rendre ces narratifs encore plus crédibles ».
Nous devons tous comprendre que nous sommes dans un contexte de guerre numérique, comme évoqué ici, et donc il est nécessaire d'acquérir une habileté pour nous informer et nous exprimer.
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